Mieux qu’un millier de versets vides de sens et qui ne concernent pas la réalisation du Nibbana, est un seul verset qui apaise celui qui l’entend.
L’histoire de Bahiyadaruciriya
Alors qu’il résidait au monastère de Jetavana, le Bouddha prononça le verset 101, en référence à Bahiyadaruciriya.
Un groupe de marchands partit en mer ; leur bateau fit naufrage et tous, sauf un, moururent. Le seul survivant s’accrocha à une planche et finit par accoster dans le port de Supparaka. Comme il était nu, il attacha la planche à son corps, s’empara d’un bol et s’assit à un endroit où les gens pouvaient le voir. Les passants lui donnèrent du riz et du gruau ; certains le prirent pour un être noble et éveillé et en firent l’éloge. Certains lui apportèrent des vêtements, mais il refusa, craignant qu’en portant des vêtements, les gens lui donnent moins. De plus, comme certains disaient qu’il était un être éveillé, il en vint à penser à tort qu’il en était vraiment un. Ainsi, parce qu’il était un homme aux vues erronées qui portait un morceau de bois comme vêtement, il fut connu sous le nom de Bahiyadaruciriya.
À peu près à cette époque, Mahabrahma, qui avait été son ami dans une de ses existences précédentes, le vit s’égarer et estima qu’il était de son devoir de remettre Bahiya sur le droit chemin. Ainsi, il vint le voir dans la nuit et lui dit : » Bahiya, tu n’as pas atteint l’éveil, et qui plus est, tu n’as pas les qualités qui font de quelqu’un un être éveillé. » Bahiya leva les yeux vers Mahabrahma et dit : » Oui, je dois admettre que je n’ai pas atteint l’éveil, comme tu le dis. Je réalise maintenant que j’ai commis un grand tort. Mais y a-t-il quelqu’un d’autre dans ce monde qui ait atteint l’Éveil ? » Mahabrahma lui dit alors qu’à Savatthi vivait le Gotama Bouddha, un être éveillé, qui avait atteint l’Éveil par lui-même.
Bahiya, réalisant l’énormité de sa faute, se sentit très affligé et courut jusqu’à Savatthi. Mahabrahma l’aida par son pouvoir surnaturel, de sorte que tout le trajet de cent vingt yojanas (1 yojana= 12 kilomètres) fut parcouru en une nuit. Bahiya trouva le Bouddha mendiant sa nourriture avec d’autres bhikkhus et le suivit respectueusement. Il supplia le Bouddha de lui enseigner le Dhamma, mais le Bouddha répondit qu’il mendiait, ce n’était pas encore le moment de faire un enseignement. Et de nouveau, Bahiya supplia : » Vénérable Seigneur, on ne peut pas savoir le danger pour votre vie ou pour la mienne, alors s’il vous plaît, enseignez-moi le Dhamma. » Le Bouddha savait que Bahiya avait fait le voyage de cent vingt yojanas en une nuit, et aussi qu’il était submergé de joie de le voir. C’est pourquoi il ne voulait pas parler du Dhamma immédiatement, mais voulait qu’il se calme pour lui permettre d’assimiler correctement l’enseignement. Cependant Bahiya persista dans sa demande. Alors le Bouddha lui dit : » Bahiya, lorsque tu vois un objet, sois conscient uniquement de l’objet visible ; lorsque tu entends un son, sois conscient uniquement du son ; lorsque tu sens, goûtes ou touches quelque chose, sois conscient uniquement de l’odeur, du goût ou du toucher ; et lorsque tu penses à quelque chose, sois conscient uniquement de la pensée. «
Après avoir entendu ce discours, Bahiya atteignit l’Éveil et il demanda la permission de rejoindre l’Ordre. Le Bouddha lui dit d’aller chercher les robes, le bol et les autres objets nécessaires à un bhikkhu. En allant les chercher, il fut encorné à mort par une vache qui était en fait une ogresse ressemblant à une vache. Lorsque le Bouddha et les autres bhikkhus sortirent après avoir pris leur repas, ils trouvèrent Bahiya étendu mort sur un tas d’ordures. Selon les instructions du Bouddha, les bhikkhus incinérèrent son corps et déposèrent ses os dans un stupa.
De retour au monastère de Jetavana, le Bouddha dit aux bhikkhus que Bahiya avait réalisé le Nibbana. Il leur dit également que Bahiya avait été le plus rapide à atteindre la compréhension claire. Les bhikkhus étaient déconcertés par cette remarque et ils lui demandèrent pourquoi et quand Bahiya avait atteint l’Éveil. Le Bouddha répondit : » Bahiya a atteint l’Éveil alors qu’il écoutait les instructions que je lui donnais sur la route, lorsque nous mendions de la nourriture. » Les bhikkhus se demandaient comment on pouvait atteindre l’Éveil après avoir écouté seulement quelques phrases du Dhamma. Le Bouddha dit que le nombre de mots ou la longueur d’un enseignement n’avait pas d’importance s’il était bénéfique pour quelqu’un.
Puis le Bouddha dit :
Mieux qu’un millier de versets vides de sens et qui ne concernent pas la réalisation du Nibbana, est un seul verset qui apaise celui qui l’entend.
Quelques réflexions …..
Cet enseignement est très important, nous avons tendance à penser qu’il est évident que nous ne voyons / entendons / goûtons / sentons que l’objet qui est présent. En fait, ce n’est pas le cas lorsque nous voyons quelque chose, nous le rendons plus que ce qu’il est réellement. Il devient bon et le désir surgit, mauvais et l’aversion surgit ou il devient mien. Nous sommes pris dans nos réactions à cet objet, nous nous attachons à cet objet et nous nous accrochons à lui et à nos opinions sur lui. Lorsque nous entraînons notre esprit, nous réalisons qu’un son n’est qu’un son, qu’une vue n’est qu’une vue et nous abandonnons nos réactions, nous pouvons alors voir la réalité objective de l’objet et nous cessons de nous raconter des histoires, notre esprit devient clair et calme.