Nous sommes notre propre refuge ; qui d’autre pourrait l’être ? Quand nous nous sommes bien entraînés, l’on obtient un refuge difficile d’accès (Nibbana).
L’histoire de la mère de Kumarakassapa
Alors qu’il résidait au monastère de Jetavana, le Bouddha prononça le verset 160, en référence à la mère de Kumarakassapa.
Un jour, une jeune femme mariée demanda à son mari la permission de devenir une bhikkhuni (nonne). Elle alla rejoindre un groupe de bhikkhunis, élèves de Devadatta* sans connaître ce maître. Cette jeune femme était enceinte avant de devenir bhikkhuni, mais elle ne le savait pas. Le temps passa et la grossesse devint évidente et les autres bhikkhunis l’emmenèrent voir leur maître Devadatta. Il lui ordonna de retourner à la vie laïque. Elle dit alors aux autres bhikkhunis : « Je n’avais pas l’intention de devenir une bhikkhuni sous la direction de votre maître Devadatta ; je suis venue ici par erreur. S’il vous plaît, emmenez-moi au monastère de Jetavana, emmenez-moi auprès du Bouddha. » Elle partit donc voir le Bouddha. Il savait qu’elle était enceinte avant de devenir une bhikkhuni et qu’elle était donc innocente. Il fit venir le roi Pasenadi de Kosala, Anathapindika, le célèbre homme riche, et Visakha, la célèbre donatrice du monastère de Pubbarama, ainsi que de nombreuses autres personnes. Il demanda à Thera Upali de régler l’affaire en public.
Visakha emmena la jeune fille derrière un rideau ; elle l’examina et rapporta à Thera Upali que la jeune fille était déjà enceinte lorsqu’elle devint bhikkhuni. Thera Upali déclara alors à l’assistance que la jeune fille était tout à fait innocente et qu’elle n’avait donc pas souillé sa moralité. En temps voulu, un fils lui est né. Le garçon fut adopté par le roi Pasenadi et fut nommé Kumarakassapa. Lorsque le garçon eut sept ans, il apprit que sa mère était une bhikkhuni et devint lui aussi un samanera (novice) sous la tutelle du Bouddha. À sa majorité, il fut admis dans l’Ordre ; en tant que bhikkhu, il prit un sujet de méditation auprès du Bouddha et se rendit dans la forêt. Là, il pratiqua la méditation avec ardeur et diligence et, en peu de temps, il atteignit l’Éveil. Cependant, il continua à vivre dans la forêt pendant douze années supplémentaires.
Ainsi, sa mère ne l’avait pas vu depuis douze ans et elle désirait ardemment voir son fils. Un jour, en le voyant, elle courut après lui en pleurant et en l’appelant par son nom. En voyant sa mère, Kumarakassapa pensa que s’il parlait agréablement à sa mère, elle resterait attachée à lui et son avenir serait gâché. Ainsi, pour le bien de son avenir (la réalisation du Nibbana), il fut délibérément sévère et lui parla durement : « Comment se fait-il que vous, membre de l’Ordre, ne puissiez même pas couper cette affection pour un fils ? » La mère pensa que son fils était très cruel envers elle, et elle lui demanda ce qu’il voulait dire. Kumarakassapa répéta ce qu’il avait dit auparavant. En entendant sa réponse, elle réfléchit : « O oui, pendant douze ans, j’ai versé des larmes pour mon fils. Pourtant, il m’a parlé durement. À quoi sert mon affection pour lui ? » Alors, la futilité de son attachement à son fils lui apparut et, à ce moment-là, elle décida de se débarrasser cet attachement entièrement et atteignit l’Éveil.
Un jour, lors de la congrégation des bhikkhus, certains bhikkhus dirent au Bouddha : » Vénérable Seigneur ! Si la mère de Kumarakassapa avait écouté Devadatta, elle et son fils ne seraient pas devenus des êtres éveillés. Certes, Devadatta avait essayé de leur faire un grand tort ; mais vous, Vénérable Seigneur, vous êtes un refuge pour eux ! ». Il leur dit : » Bhikkhus ! En essayant d’atteindre le monde des deva, ou en essayant d’atteindre l’Eveil, vous ne pouvez pas dépendre des autres, vous devez travailler dur par vous-même. »
Puis le Bouddha dit :
Nous sommes notre propre refuge ; qui d’autre pourrait l’être ? Quand nous nous sommes bien maîtrisés nous atteignons un refuge si difficile d’accès (Nibbana).
* Devadatta : cousin de Bouddha et membre de la communauté monastique. Bien connu comme ennemi acharné du Bouddha.
Quelques réflexions …..
Nous formons des attachements forts avec des personnes telles que nos enfants, notre partenaire, nos parents, etc. mais en fait, cet attachement n’est pas réellement lié à la personne telle qu’elle est, mais à une image, une idée que nous avons de ce qu’elle est. Lorsque le comportement de la personne à laquelle nous sommes attachés remet en question nos idées ou nous nions l’évidence devant nos yeux et continuons à penser et à ressentir la même chose ou notre attachement change et peut s’affaiblir, ce qui est généralement un processus douloureux.
Dans le bouddhisme, nous mentionnons souvent l’amour d’une mère comme modèle, mais c’est l’amour que nous évoquons et non l’attachement. L’amour est pur et les enfants dépendent de cet amour pour leur survie, mais l’attachement n’est pas pur, c’est une relation de dépendance émotionnelle qui conduit à la souffrance.
Souvent, nous prenons notre famille, nos amis et nos possessions comme refuge, mais ceux-ci sont impermanents et, comme nous, ils mourront un jour ou nous quitteront ou nous perdrons nos possessions. Une pensée qui donne à réfléchir est que nous sommes nés seuls et nus et que nous mourrons seuls et nus, nous ne pouvons emporter personne ni rien avec nous. Lorsque nous réalisons cela, nous comprenons que le véritable refuge se trouve dans un esprit bien entraîné et libéré.