Dhammapada Versets 179 – 180

Verset 179 : Le Bouddha, dont la victoire sur les souillures morales est complète, en qui ne peut surgir aucune impureté, d’une sagesse infinie, comme l’oiseau dans le ciel, ne laisse aucune trace sur son passage. Par quel chemin pourrait-on l’égarer ?

Verset 180 : Le Bouddha, en qui il n’y a pas de désir qui mène au devenir, d’une sagesse infinie comme l’oiseau dans le ciel, ne laisse aucune trace sur son passage. Par quel chemin pourrait-on l’égarer ?

L’histoire des trois filles de Mara

Le Bouddha prononça pour la première fois les versets 179 et 180 alors qu’il résidait près de l’arbre Bodhi, à propos des trois filles de Mara. Il répéta ces versets au brahmane Magandiya alors qu’il traversait le pays des Kurus.

Le brahmane Magandiya et sa femme vivaient dans le royaume des Kurus avec leur fille Magandiya qui était extrêmement belle. Elle était si belle que son père repoussait grossièrement tous ses prétendants. Un jour, tôt le matin, lorsque le Bouddha examinait le monde, il constata que le moment était venu pour le brahmane Magandiya et sa femme d’atteindre le premier stade de l’Éveil. Ainsi, prenant son bol et ses robes, il se dirigea vers l’endroit où le brahmane se rendait habituellement pour offrir un sacrifice par le feu.

Le brahmane, voyant le Bouddha, décida qu’il était la personne la plus digne de sa fille. Il le supplia de l’attendre là et s’empressa d’aller chercher sa femme et sa fille. Le Bouddha laissa son empreinte et se rendit dans un autre endroit, tout proche. Lorsque le brahmane et sa famille arrivèrent, ils ne trouvèrent que l’empreinte. En voyant l’empreinte, la femme du brahmane remarqua que c’était l’empreinte de quelqu’un qui était libre de tout désir sensuel. Ensuite, le brahmane le vit et lui offrit sa fille en mariage.

Il n’accepta ni ne refusa l’offre, mais il raconta d’abord au brahmane comment les filles de Mara*, Tanha (désir ardent, passion), Arati (mécontentement) et Raga (convoitise), l’avaient tenté peu après avoir atteint l’état de Bouddha. Il leur avait dit : « Il est inutile d’essayer de tenter quelqu’un qui est libre de tout désir, de tout attachement et de toute passion, car il ne peut être attiré par quelque tentation que ce soit. »

Puis le Bouddha dit :

Le Bouddha, dont la victoire sur les souillures morales est complète, en qui ne peut surgir aucune impureté, d’une sagesse infinie, comme l’oiseau dans le ciel, ne laisse aucune trace sur son passage. Par quel chemin pourrait-on l’égarer ?

Le Bouddha, en qui il n’y a pas de désir qui mène au devenir, d’une sagesse infinie comme l’oiseau dans le ciel, ne laisse aucune trace sur son passage. Par quel chemin pourrait-on l’égarer ?

Puis, le Bouddha poursuivit :  » Brahmane Magandiya, même lorsque j’ai vu les filles incomparables de Mara, je n’ai ressenti aucun désir sensuel en moi. Après tout, qu’est-ce que le corps de votre fille ? Il est plein d’urine et de saleté ; je ne voudrais pas le toucher même avec mon pied ! » En entendant ces paroles du Bouddha, le brahmane et sa femme atteignirent le premier stade de l’Éveil. Plus tard, ils rejoignirent l’Ordre du Bouddha et éventuellement tous deux atteignirent l’Éveil.

* Mara : le « tentateur », personnification du mal et des influences négatives.

Quelques réflexions …..

Que nous croyions en Mara ou non, le message du verset est le même. Les trois filles sont symboliques, comme le montrent leurs noms, décrivent des états d’esprit intérieurs : le désir ardent, le mécontentement et la convoitise.

Nous avons tendance à penser que le désir est acceptable et, d’une certaine manière, bénéfique, car il nous fait sortir du lit le matin, nous motive à travailler et à participer à des projets avec d’autres personnes, etc. Cependant, nous nous arrêtons rarement pour regarder et penser à ce que le désir ardent fait à notre esprit.

Le désir nous rend malheureux et avide, on n’en a jamais assez ; dès que nous satisfaisons le désir pour une chose, nous en voulons plus ou nous voulons quelque chose de nouveau, nous poursuivons le nouveau désir et nous réalisons qu’il n’est pas satisfaisant et donc nous ne sommes jamais en paix, nous ne sommes jamais heureux et satisfaits. De plus, dans notre quête, nous devenons souvent malhonnêtes ou à la limite de la malhonnêteté, voire nous volons, nous commettons des actes violents, nous nous comportons mal avec notre partenaire, notre famille, nos amis et nos collègues et nous devenons de plus en plus insatisfaits.

Ce cercle vicieux ne s’arrête que lorsque nous réalisons que le bonheur ne se trouve pas dans la poursuite du désir, mais dans le fait de se contenter de ce que nous avons, même si c’est très modeste. C’est aussi la réalisation que les objets des sens sont impermanents et ne peuvent donc pas apporter de satisfaction durable. Les gens ne peuvent pas non plus apporter de satisfaction, parce que, comme nous, ils sont mortels, et comme nous, ils cherchent le bonheur dans les mauvais endroits, ils ne peuvent donc pas être un refuge pour nous. Le véritable refuge se trouve dans un esprit qui voit la réalité telle qu’elle est vraiment.