Verset 197 : Heureux, vivons-nous, ne haïssant personne parmi ceux qui haïssent ; parmi les hommes qui haïssent, nous vivons sans haine.
Verset 198 : Heureux, vivons-nous, en bonne santé parmi les affligés (par les souillures) ; parmi les hommes qui sont affligés, nous vivons en bonne santé.
Verset 199 : Heureux, vivons-nous, sans avidité parmi ceux qui sont avides ; parmi ceux qui sont avides, nous vivons sans avidité.
L’histoire de la pacification des proches du Bouddha
Le Bouddha prononça les versets 197 à 199, en pays Sakyan, en référence à ses proches qui se disputaient l’utilisation de l’eau de la rivière Rohini.
Kapilavatthu, la ville des Sakyans, et Koliya, la ville des Kolyans, étaient situées de part et d’autre de la rivière Rohini. Les agriculteurs des deux villes travaillaient les champs arrosés par la rivière Rohini. Une année, il n’y avait pas eu assez de pluie et constatant que le riz paddy et les autres cultures commençaient à se dessécher, les agriculteurs des deux côtés voulurent détourner l’eau de la rivière vers leurs propres champs. Ceux qui vivaient à Koliya disaient qu’il n’y avait pas assez d’eau dans la rivière pour les deux côtés, et que si seulement ils pouvaient canaliser l’eau une fois de plus vers leurs champs, cela suffirait pour que le riz paddy mûrisse et se développe. D’un autre côté, les habitants de Kapilavatthu interprétèrent cela comme un refus de les laisser utiliser l’eau. Ils craignaient que leurs récoltes soient mauvaises et qu’ils soient donc obligés d’acheter leur nourriture des Kolyans.
Les deux parties ne voulaient l’eau que pour leur propre usage et il y avait beaucoup de mauvaise volonté entre elles en raison de propos abusifs et d’accusations des deux côtés. La querelle qui avait commencé entre les agriculteurs est parvenue aux oreilles des ministres concernés, qui, à leur tour, rapportèrent l’affaire à leurs dirigeants respectifs, et les deux parties se préparèrent à entrer en guerre.
Le Bouddha, surveillant le monde avec ses pouvoirs surnaturels, vit des membres de sa famille des deux côtés du fleuve sortir pour se rencontrer en bataille et il décida de les arrêter. Tout seul, il se rendit vers eux en traversant le ciel, et s’arrêta au-dessus du milieu de la rivière. Ses proches le voyant, assis puissant mais paisible au-dessus d’eux dans le ciel, cachèrent toutes leurs armes et lui rendirent hommage. Puis, Le Bouddha dit « Qu’est-ce qui est important, l’eau ou les êtres humains ? L’eau n’a aucune valeur par rapport à la vie d’un être humain. Vous avez perdu de vue ce qui est important. Pour de l’eau, qui n’a que peu de valeur, vous ne devez pas détruire vos vies qui ont tant de valeur, qui sont sans prix. Si je ne vous avais pas arrêtés aujourd’hui, votre sang coulerait comme une rivière. Vous vivez en haïssant vos ennemis, mais je n’en ai aucun à haïr ; vous êtes atteints de souillures morales, mais je m’en suis libéré ; vous désirez les plaisirs sensuels, mais je n’y aspire pas ».
Heureux, vivons-nous, ne haïssant personne parmi ceux qui haïssent ; parmi les hommes qui haïssent, nous vivons sans haine.
Heureux, vivons-nous, en bonne santé parmi les affligés (par les souillures) ; parmi les hommes qui sont affligés, nous vivons en bonne santé.
Heureux, vivons-nous, sans avidité parmi ceux qui sont avides ; parmi ceux qui sont avides, nous vivons sans avidité.
Quelques réflexions …..
Les choses pour lesquelles nous nous battons ont, la plupart du temps, beaucoup moins de valeur que les personnes avec lesquelles nous nous battons. Mais, lorsque nous nous battons/ disputons/ sommes en conflit, nous oublions l’importance des personnes avec lesquelles nous nous battons et nous nous concentrons uniquement sur la chose pour laquelle nous nous battons parce que nous sommes submergés par le désir. Lorsque nous considérons les personnes que nous voyons comme des ennemis, nous pensons qu’elles sont la cause de notre souffrance et nous avons une vision très déséquilibrée d’elles, nous oublions leurs bonnes qualités et leur importance dans le monde.
Il est également important d’être conscient de la façon dont nous laissons les gens qui nous entourent influencer nos attitudes, nos croyances et nos façons de comprendre les autres et la vie. Par exemple, dans cette histoire, nous voyons comment un conflit sur l’accès à l’eau est amplifié par des insultes au point que la guerre est déclarée entre des personnes qui sont membres d’une même famille au lieu d’être négocié pacifiquement. La pleine conscience peut nous aider à voir les choses différemment, car nous voyons que l’expérience est différente de la réaction et c’est là que réside l’indépendance. Lorsque nous entendons ou voyons quelque chose cette information arrive dans notre esprit, nous pouvons décider de la manière dont nous allons traiter cette information : allons-nous décider d’entamer un conflit avec cette personne ? allons-nous considérer la situation comme une menace ? ou allons-nous agir de manière pacifique, en considérant la cause du conflit potentiel comme vide de tout sens réel ?
Le bonheur dont parle le Bouddha est le genre de bonheur qui est indépendant de la situation dans laquelle nous nous trouvons. Cela vient du fait de voir la réalité telle qu’elle est réellement, la vacuité des choses matérielles, l’importance et la brièveté de la vie.