Une histoire de conscience
Le Bodhisattva était le fils d’illustres brahmanes respectés pour leur ascendance et leur conduite. Il excellait dans les études. À l’âge approprié, il fut envoyé vivre et étudier auprès d’un grand maître.
Pour évaluer la vertu de ses disciples, il se plaignait tous les jours de vivre dans la pauvreté. Ses élèves commencèrent alors à mendier plus activement, mais il répondit que, même avec une meilleure nourriture, il ne serait pas libéré des souffrances de la pauvreté. Il dit que pour améliorer sa situation, ils devaient acquérir des richesses. Or, les lois du pays stipulaient qu’aucun brahmane n’était autorisé à acquérir des richesses, sauf si elles leur étaient offertes en présent. Les habitants de la région étaient réputés pour leur manque de charité. Le maître leur dit d’examiner les lois avec plus d’attention, notant qu’elles autorisaient effectivement les brahmanes à voler en cas de détresse. Sa situation précaire justifiait clairement une telle mesure.
Tous les disciples, sauf le Bodhisattva, commencèrent immédiatement à comploter sur ce qu’ils allaient voler et sur la manière de rester cachés. Silencieux et honteux, le Bodhisattva s’assit, les yeux baissés, n’approuvant ni ne dénonçant leurs intrigues. Le maître continua son test et défia le Bodhisattva, affirmant qu’il n’était visiblement pas affecté par sa détresse. Il remarqua qu’alors que tous les autres élèves planifiaient héroïquement leur mission, lui semblait paresseux et impartial. Le Bodhisattva répondit que ce n’était pas un manque d’affection ni un cœur froid qui le maintenaient dans le silence, mais que les actions suggérées par le maître étaient impossibles à mener à bien. Il expliqua qu’il est impossible de perpétrer des actes malveillants sans être vu, car personne n’est jamais véritablement seul. Les yeux divins des êtres éveillés veillent en permanence.
En entendant ces paroles, le maître se leva de son siège, empli de joie et d’admiration, et embrassa le Bodhisattva. Il poursuivit en expliquant que les vertueux ne peuvent jamais s’éloigner de leur voie, même dans les moments de grande détresse. La pratique ascétique, l’étude et la sagesse constituent toutes les richesses nécessaires.

