Une histoire de générosité désintéressée
Dans cette vie, le Bodhisattva naquit sous la forme d’un animal, un lapin. Pourtant, même en tant que lapin, il possédait une vertu, une bonté, une beauté et une vigueur remarquables, au point que les autres animaux le considéraient comme leur roi. Personne ne le craignait et personne ne lui inspirait de crainte. Parmi ses fidèles disciples, trois animaux en particulier devinrent ses élèves et compagnons les plus proches. Il s’agissait d’une loutre, d’un chacal et d’un singe. Grâce à l’enseignement du Bodhisattva, ils oublièrent leur nature animale inférieure et devinrent eux-mêmes des êtres remplis de compassion sans limites.
Selon l’enseignement du lapin la veille, il était d’usage, le jour saint suivant, d’offrir l’aumône à toute personne traversant leur forêt. Cependant, plus tard dans la nuit, le lapin se sentit désemparé lorsqu’il réalisa qu’il n’avait rien à offrir. Ses trois compagnons avaient largement de quoi nourrir un invité. Le lapin, lui, n’avait rien d’autre que les maigres brins d’herbe qu’il mangeait pour se sustenter, qui étaient bien trop amers pour être offerts à un visiteur. Il réalisa qu’il pouvait offrir sa propre chair en nourriture et, sans hésitation, décida que c’était ce qu’il ferait.
En entendant cela, Shakra, le seigneur des dieux, alla tester les animaux et se déguisa en voyageur fatigué qui s’était égaré. Il apparut affamé, assoiffé et pleurant de désespoir. Les quatre animaux se précipitèrent à son secours. La loutre put lui offrir sept poissons, le chacal lui donna du lait caillé et un lézard, tandis que le singe lui apporta des mangues mûres et juteuses. Voyant que l’homme avait allumé un feu, le lapin expliqua qu’il offrait son propre corps. Puis, sans hésiter, il sauta dans les braises ardentes et les flammes tourbillonnantes.
Shakra se réjouit, plongea sa main dans le brasier. Il en retira le lapin et le leva vers le ciel, l’exposant aux dieux.
Puis, Shakra, pensant au bien du monde et à l’exemple glorieux du bodhisattva animal, décorât le sommet de son palais, Sudharma, le palais des dieux, avec une représentation d’un lapin, et fit de même pour la face de la lune. On dit que, même aujourd’hui, on peut encore voir l’image du lapin dans la pleine lune.

