Dhammapada Versets 296 – 301

Verset 296 : Pleinement éveillés et toujours vigilants sont les disciples du Bouddha Gotama, qui de jour comme de nuit, tournent leur attention vers les vertus du Bouddha.

Verset 297 : Pleinement éveillés et toujours vigilants sont les disciples du Bouddha Gotama, qui de jour comme de nuit tournent leur attention vers les vertus du Dhamma.

Verset 298 : Pleinement éveillés et toujours vigilants sont les disciples du Bouddha Gotama, qui de jour comme de nuit, tournent leur attention vers les vertus du Sangha.

Verset 299 : Pleinement éveillés et toujours vigilants sont les disciples du Bouddha Gotama, qui de jour comme de nuit, tournent leur attention vers la contemplation du corps.

Verset 300 : Pleinement alertes et toujours vigilants, les disciples du Bouddha Gotama, dont l’esprit, jour et nuit, se réjouit à développer la bienveillance.

Verset 301 : Pleinement alertes et toujours vigilants, les disciples du Bouddha Gotama, dont l’esprit, jour et nuit, se réjouit à développer le cœur et l’esprit par la méditation.

L’histoire du fils d’un bûcheron

Alors qu’il résidait au monastère de Jetavana, le Bouddha prononça les versets 296 à 301, à propos du fils d’un bûcheron.

Un jour, à Rajagaha, un bûcheron se rendit dans les bois avec son fils pour couper du bois de chauffage. En rentrant chez eux le soir, ils s’arrêtèrent près d’un cimetière pour prendre leur repas. Ils enlevèrent également le joug des deux bœufs pour leur permettre de brouter à proximité, mais les deux bœufs s’en allèrent sans que le bûcheron ou son fils s’en aperçoivent. Dès qu’ils s’aperçurent de l’absence des bœufs, le père partit à leur recherche, laissant son fils avec le chariot de bois. Il entra dans la ville à la recherche de ses bœufs. Lorsqu’il revint vers son fils, il était tard et la porte de la ville était fermée. Le jeune garçon dut donc passer la nuit seul sous le chariot.

Le fils du bûcheron, bien que jeune, était toujours attentif et avait l’habitude de contempler les qualités uniques du Bouddha. Cette nuit-là, deux ogres vinrent l’effrayer et lui faire du mal. Lorsque l’un des ogres tira sur la jambe du garçon, celui-ci s’écria : « Je rends hommage au Bouddha (Namo Buddhassa) ». En entendant ces mots, les ogres prirent peur et eurent la sensation qu’ils devaient veiller sur le garçon. Ainsi, l’un d’eux resta près du garçon, le protégeant de tout danger ; l’autre se rendit au palais du roi et apporta le plateau de nourriture du roi Bimbisara. Les deux ogres nourrirent alors le garçon comme s’il était leur propre fils. Au palais, l’ogre laissa un message écrit concernant le plateau royal ; et ce message n’était visible que par le roi.

Au matin, les hommes du roi découvrirent que le plateau royal avait disparu et ils furent très bouleversés et très effrayés. Le roi trouva le message laissé par l’ogre et indiqua à ses hommes où le chercher. Ils trouvèrent le plateau royal parmi le bois dans le chariot. Ils trouvèrent aussi le garçon qui dormait encore sous la charrette. Lorsqu’ils l’interrogèrent, le garçon répondit que ses parents étaient venus le nourrir pendant la nuit et qu’il s’était endormi avec satisfaction et sans crainte après avoir pris sa nourriture. Le garçon ne savait rien de plus. Le roi fit venir les parents du garçon et les emmena auprès du Bouddha. Le roi avait alors entendu dire que le garçon était toujours attentif aux qualités uniques du Bouddha et qu’il avait crié « Namo Buddhassa » lorsque l’ogre lui tirait la jambe pendant la nuit.

Le roi demanda au Bouddha : « La conscience des qualités uniques du Bouddha, est-elle le seul dhamma qui donne une protection contre le mal et le danger, ou la conscience des qualités uniques du Dhamma est-elle tout aussi puissante ? ». Le Bouddha lui répondit : « O roi, mon disciple ! Il y a six choses dont la pleine conscience est une bonne protection contre le mal et le danger. »

Puis le Bouddha dit :

Pleinement éveillés et toujours vigilants sont les disciples du Bouddha Gotama, qui de jour comme de nuit, tournent leur attention vers les vertus du Bouddha.

Pleinement éveillés et toujours vigilants sont les disciples du Bouddha Gotama, qui de jour comme de nuit tournent leur attention vers les vertus du Dhamma.

Pleinement éveillés et toujours vigilants sont les disciples du Bouddha Gotama, qui de jour comme de nuit, tournent leur attention vers les vertus du Sangha.

Pleinement éveillés et toujours vigilants sont les disciples du Bouddha Gotama, qui de jour comme de nuit, tournent leur attention vers la contemplation du corps.

Pleinement alertes et toujours vigilants, les disciples du Bouddha Gotama, dont l’esprit, jour et nuit, se réjouit à développer la bienveillance.

Pleinement alertes et toujours vigilants, les disciples du Bouddha Gotama, dont l’esprit, jour et nuit, se réjouit à développer le cœur et l’esprit par la méditation.

À la fin du discours, le garçon et ses parents atteignirent le premier stade de l’Éveil. Plus tard, ils rejoignirent l’Ordre du Bouddha et atteignirent l‘Éveil.

Quelques réflexions …..

Les trois versets font allusion aux trois refuges. Lorsqu’il est dit que la pratique de l’enseignement du Bouddha commence par la prise de refuge, cela soulève immédiatement une question importante. La question est : « Quel besoin avons-nous d’un refuge ? » Un refuge est une personne, un lieu ou une chose donnant une protection contre le mal et le danger.  Quel est le mal et le danger dont nous devons être protégés ?  Si nous faisons le bilan de notre vie, nous ne nous voyons peut-être pas exposés à un danger personnel imminent. Nos emplois peuvent être stables, notre santé bonne, nos familles bien pourvues, nos ressources adéquates, et tout cela peut nous donner une raison suffisante pour nous considérer en sécurité. Dans ce cas, la recherche d’un refuge devient totalement superflue.

Pour comprendre la nécessité d’un refuge, nous devons apprendre à voir notre position telle qu’elle est réellement. La véritable voie de la sécurité passe par une vision correcte, et non par des vœux pieux. Pour aller au-delà de la peur et du danger, nous devons percer à jour les tromperies qui nous bercent dans une complaisance confortable, et regarder la réalité de notre existence, sans nous détourner mal à l’aise ou courir après des distractions.  

Le danger le plus évident auquel nous sommes confrontés est la fragilité même de notre corps physique et ce qui le maintient en vie. Dès notre naissance, nous sommes exposés aux maladies, aux accidents et aux blessures. La nature nous trouble avec des catastrophes comme les tremblements de terre et les inondations, la société avec le crime, l’exploitation, la répression et la menace de guerre. Les événements politiques, sociaux et économiques passent rarement très longtemps sans éclater en crise. Même en période de relative tranquillité, l’ordre de nos vies n’est jamais tout à fait parfait. Il y a toujours quelque chose qui nous trouble et qui menace notre « sécurité ».  Les accrocs et les difficultés se succèdent sans fin.

Même si nous avons la chance d’échapper aux graves adversités, il en est une que nous ne pouvons éviter. Il s’agit de la mort. Nous sommes condamnés à mourir, et avec toute notre richesse, nos talents, nos connaissances et notre pouvoir, nous restons impuissants devant notre inévitable mortalité. La mort pèse sur nous dès notre naissance. Chaque instant nous rapproche de l’inéluctable.

Les dangers qui pèsent sur nous sont rendus encore plus problématiques par leur caractéristique commune d’incertitude. Nous ne savons pas quand ils se produiront. Même la mort n’est certaine que dans la mesure où nous pouvons être sûrs qu’elle frappera. Le moment exact où elle frappera est incertain. L’élément d’incertitude tend à provoquer en nous une inquiétude persistante qui se cache sous notre assurance de surface. Au plus profond de nous-mêmes, nous ressentons l’instabilité de nos certitudes, leur caractère éphémère et leur vulnérabilité au changement, et cette conscience produit une appréhension lancinante qui s’élève parfois jusqu’à l’anxiété.

Nous prenons refuge dans le Bouddha parce qu’il a lui-même atteint l’absence totale de danger et peut nous conduire au même état de sécurité. Nous prenons refuge dans le Dhamma parce qu’il est le chemin, la voie qui mène à ce but ; et nous avons aussi besoin d’un ensemble d’instructions qui nous guident le long du chemin. Et finalement, nous prenons refuge dans le Sangha, la communauté des personnes spirituelles qui sont entrées dans la voie, ont réalisé le but et peuvent maintenant enseigner la voie aux autres.